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dimanche 18 avril 2010

Hawkwind - Space Ritual


Superbe objet que ce Space Ritual. Hawkwind est sans conteste en 1973, en témoigne sa musique et même la pochette de son disque, l’entertainer n°1 (ce qui ne signifie pas qu’ils aient eu le succès qu’ils méritaient), capable de développer son propre imaginaire, sa propre réflexion, aboutie et attirante. En 1969, l’homme a mis le pied sur la lune et se demande : et maintenant ? Accompagnés en concert de l’écrivain de science-fiction Michael Moorcock, Hawkwind apportent en ce monde concret et industrieux une réponse à nos oreilles, au-delà de ce que notre orgueil et notre manque d’intérêt pour les questions d’ordre métaphysique méritaient. A la basse, Lemmy qui formera ensuite le trio Motorhead. Il apporte un groove indissociable du son d’Hawkwind, ce qui fait que même les auditeurs indifférents à la musique exploratoire auront leur compte, quitte à se délecter de l’enveloppe, du langage sans se soucier des velléités pittoresques de ce qui est raconté. Cependant la ferveur narrative et musicale fusionne dans le style Hawkwind. Space Ritual est le meilleur moyen d’en faire l’expérience. Plus que jamais, la musique populaire est imaginée pour aller d’un point à un autre ; ce qui fait de ce concert l’un des meilleurs de la musique rock, c’est qu’il entame un véritable voyage, intègre le public à une entité aussi concrète qu’elle est originale, se pense en moyen, en outil plutôt qu’en simple notice.

Space Ritual, c’est 80 minutes de musique plutôt surprenante ; à la fois planante et diablement efficace, elle puise ses sources chez Can plutôt que chez Pink Floyd, s’attachant à développer une base harassante, une dynamique proche de ce que peut être une mise en hypervitesse, avec la sensation d’être écrasé contre une vitre de plexiglas. 2001, l’Odyssée de l’Espace a fait son petit bout de chemin, et pour résumer en quelques secondes de déplacement l’expérience de l’auditeur de Space Ritual, il aura l’impression de vivre les mêmes vicissitudes que le héros du film de Kubrick. Balloté sans trop comprendre dans tous les coins de sa capsule, avec des échos de voix et des bruitages désuets comme seul compagnon, on ne peut s’empêcher de se sentir diablement seul dans le vide intersidéral visité par le groupe à grand renfort de machines analogiques. Ans chercher à être toujours attrayant ni compréhensible, Space Ritual est l’histoire d’une course, la représentation d’une conquête, la réponse anglaise aux russes et autres américains qui croient que l’espace leur appartient. Et bien non ! Car plus important que ce satellite froid et gris qu’on appelle Lune, moins rassurant que les images home sweet home véhiculées par a Nasa pour illustrer le périple de leurs pionniers – prisonniers, Hawkwind évoque plutôt les sujets qui fâchent ; solitude, folie, mégalomanie et mort de l’aventurier en quête d’infini. Mais il propose heureusement avant tout une vision séduisante, foisonnante et poétique de l’espace comme d’une personnalité sans pitié, moins silencieuse que jamais. Hawkwind sait que c’est l’image que e fait de l’espace qui est importante, le fantasme, non a réalité qu’on ne peut imaginer.

De larges extraits sont issus de Doremi Fasol Latido, l’album qui fut en 1971 le tournant pour le groupe dont le style fut soudain qualifié de Space rock. Il y a l’irrésistible Down Throught the Night, leur charmeur Space is Deep, introduit par un monologue en forme de mise en garde à ceux qui croient l’espace déjà conquis par l’homme (en réalité, l’homme ne conquiert que du vide et sa propre idée de conquête). Born to Go est très représentatif du discours à double tranchant du groupe, qui suggère la prudence au moment de manipuler les concepts foireux qui frappent celui qui cherche à s’envoler. Moorcock n’est pas utopiste ; il pense que l’homme n’est condamné qu’à se répéter, à se réincarner seulement dans des apparences changeantes mais sans que son fond n’évolue, à rester toujours nostalgique, et surtout dans les endroits où il se sent le moins à sa place. Pour finalement, au bout du voyage, n’élucider que le mystère de sa propre âme, de son intérieur, tandis que tout ce qui le domine, tout son environnement reste mystérieux. Il y a, enfin, Brainstorm, le morceau ultime de Hawkwind. On ne peut pas parler d’hostilités ; il ne faut pas oublier que, comme le suggère la pochette de Space Ritual, le groupe cherche d’abord à nous séduire. On comprend que la réalité peut être à la fois dure, inhumaine et excitante, et c’est là l’idée la plus intéressante en science-fiction.

Les admirateurs du Floyd, et les autres, devaient reconnaître qu’ils apportaient quelque chose de nouveau. Là où le groupe de Barrett évoluait dans la grâce de l’instant, Hawkwind symbolisait la fuite en avant, concept qui, comme me l’a fait remarquer quelqu’un, a commencé à cette époque et est plus que jamais d’actualité aujourd’hui. En 2010, Hawkwind continue de faire des concerts ; et, bien que le combo soit ressorti affaibli de nombreuses années à ne rien produire d’intéressant, ils continuent d’incarner l’expérience totale. Sur scène, les prennent plusieurs dimensions, dégagent des artifices visuels et sonores, soutirent de leurs machines amusantes un arc de pur talent musical, parviennent à faire vibrer l’atmosphère, et peut-être à envoyer des signaux à des planètes lointaines. Au fond, ils ne sont pas agressifs, au contraire, ils deviennent au cœur de leur naïveté et de leur foi à l’ouvrage, humanistes ; ils nous mettent en garde contre la folie de toujours vouloir davantage, la déraison du pionnier qui cherche sans cesse à baliser de nouvelles terres auparavant vierges.

J’ai expérimenté ce disque alors que je prenais le bus pour rentrer à Streatham Hill, le soir vers deux heures du matin, après le travail. Accompagné de l’un des livres de Moorcock en langue originale… C’est le soulagement d’être prêt à dormir, transporté par ce bus à étage, que m’évoque aujourd’hui Space Ritual.

  • Parution : 11 mai 1973
  • Label : United Artists
  • Producteur : Hawkwind
  • Genre : Space rock
  • A écouter : Down Throught the Night, Space is Deep, Brainstorm

  • Appréciation : Monumental
  • Note : 8.25/10
  • Qualités : fun, original, intense

 

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