“…you can hear whatever you want to hear in it, in a way that’s personal to you.”

James Vincent MCMORROW

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Trip Tips - Fanzine musical !

lundi 13 juin 2011

Treme - 2 ème partie

Treme : Music from the Hbo original Series

Rebirth Brass Band

 
Steve Zahn et son modèle Davis Rogan




Quand Boutté entendit parler pour la première fois du projet d’une série de la chaîne HBO (The Wire, Mad Men) dont l’action se déroulerait quelques mois après Katrina, au cœur de la Nouvelle Orléans, il fut, comme beaucoup de gens sur place, sceptique. Les habitants locaux avaient l’habitude de servir de décor dans des productions qui déformaient la réalité, mais n’avaient jamais été le centre de l’action et de l’attention. Ils savaient leur musique appréciée tandis qu’eux-mêmes demeuraient incompris. La série remet la musique et la culture néo-orléanaise au centre du monde ; même les Mardi Gras Indians et leurs traditions ancestrales y sont introduits – ils y préparent leur parade de la Saint Joseph, le 19 mars. On y vit au rythme de la ville, comme si on y était ; les scènes musicales y sont notamment enregistrées en live, chose rare lorsqu’on passe du documentaire à la fiction. La plupart des acteurs sont musiciens, parfois doublés en direct par des musiciens hors cadrage. Surtout, la quantité de musique dans la série dépasse de loin tout ce qui avait été vu et entendu auparavant sur le petit écran – jusqu’à 19 scènes musicales dans un épisode d’une heure ! Allen Toussaint, Dr John, Steve Earle, Irma Thomas et le chanteur swamp blues Coco Robicheaux y jouent leur propre rôle. D’autres musiciens connus localement y apparaissent également, comme Trombone Shorty, Donald Harisson et les brass bands qui ont redoublé d’activité et d’inventivité après la catastrophe ; Treme Brass Band, Free Agents Brass Band, Hot 8 Brass Band, Little Rascals Brass Band, Little Stooges Brass Band... Tous les musiciens dans les parages finissent à un moment ou à un autre par s’y retrouver. A Boutté revient l’honneur de réenregistrer The Treme Song pour servir de générique à la série.
La bande originale qui sera tirée de la série est un album de dix-neuf titres qui constitue l’une des célébrations les plus vivantes et bourrées d’optimisme de la culture locale actuelle. Treme : Music From the HBO Original Series alterne de grands classiques dans leurs versions les plus vivaces – I Hope Your Comin’ Back to New Orleans par les New Orleans Jazz Vipers, Ooh Poo Pah Doo par James Andrews, Time is on My Side par Irma Thomas, My Indian Red par Dr John – une chanson qui à elle seule résume tout l’esprit d’impertinence et toute l’affection mutuelle qui fait le jeu des musiciens locaux. Ambassadeur musical mondialement reconnu, Dr John fait toujours preuve d’humilité, d’amitié et de fascination quand il en vient aux valeurs ancestrales de son berceau néo-orléanais. Le calypso de Skokiaan (du trompettiste jazz Kermit Ruffins) ou le Buona Sera de Louis Prima apportent de la mixité. Une telle nostalgie de la Nouvelle-Orléans culturelle, et cette envie de la reconstruire, ne semblait possible qu’en égard de la diversité des origines de la population locale. Descendants des Antilles, ou de l’autre côté de l’océan, ils avaient fait de la ville cette capitale providentielle. Par bien des travers américaine – son taux record de violence, ses réseaux de trafic de drogue – la Nouvelle Orléans échappe à toute comparaison parce qu’elle est aussi le produit de la détermination de ceux qui s’y sont retrouvés. « Je pense que nous n’avons pas d’autre choix, explique Boutté. « Il n’y a de place pour nous nulle part ailleurs, ou irions-nous ? »  
Shame Shame Shame, originairement enregistrée par Smiley Lewis, est transformée par l’équipe de la série sans perdre une miette de jouissance. L’interprétation survitaminée qu’en fait l’acteur Steve Zahn, supporté par Kermit Ruffins à la trompette,  donne l’une des scènes les plus mémorables de la première saison. Zahn interprète Davis, un personnage inspiré par Davis Rogan, DJ touche-à-tout de la scène néo-orléanaise actuelle. « Davis est un excentrique classique pour la Nouvelle-Orléans, visionnaire, un type passionné qui est guidé par sa musique et son amour de la ville et de sa culture. Il est vraiment une voix pour la scène jazz ici, et pas seulement cette scène-là mais la scène musicale en général. Il s’est fait virer de WWOZ (une radio locale) pour avoir passé de la musique rap dans une émission consacrée à la Nouvelle-Orléans parce que son idée c’est, ‘Nous voulons passer la meilleure musique produite en ce moment, et le rap en fait partie. ‘ Mais ils l’ont viré car c’était une station jazz. » Le rap est en quelque sorte un procédé qui consiste à explorer une culture particulière et à courir le plus loin possible avec  - Lil Wayne est t-il perçu comme ayant dénaturé, dépossédé la ville d’une partie de son intégrité ? Comme les autres acteurs de la série, il y a pour Steve Zahn un parallèle étroit entre sa condition de comédien et ses convictions personnelles qui n’existe que rarement dans d’autres expériences filmées. « Vous devez vraiment y aller, vous y intégrer et le faire. J’ai fait le tour du monde deux fois et je n’ai jamais visité une autre ville qui ressemble à celle-là. »
A l’instar du What’s Going On de Marvin Gaye, dont l’ombre bienveillante plane sur cette collection de chansons refusant le misérabilisme – pour une collection plus recueillie, écouter l’album de soutien paru en 2005, Our New Orleans – c’est une culture où les gospels deviennent des slogans. Shame Shame Shame lancera la campagne de Zahn avec des propositions telles que « de l’herbe pour les nids-de-poule » (pot for the potholes), faisant preuve d’amère naïveté face à la lenteur des autorités à réagir – pas d’électricité, pas d’eau pendant des semaines, des mois dans certains quartiers, et les routes impraticables. Le jeune Free Agents Brass Band est largement reconnu grâce à leur hymne festif et urbain au titre quasi-biblique : We Made It Trought That Water – un véritable leitmotiv qui définit toute leur philosophie. La grande qualité de cette musique est aussi d’être captée dans les foules : une chanson comme Ooh Poo Pah Doo galvanise la vie de tout un quartier. Feel Like Funkin’ it Up (enregistré pour la première fois en 1989) ouvre la série et impose toute la puissance festive des brass bands. Ils n’ont peut-être jamais été autant au goût du jour qu’aujourd’hui. Ils jouent fort et jouent pour tous. L’occasion pour le Rebirth Brass Band de s’offrir une nouvelle jeunesse, et des places dans les charts américains.
Fondé à la fin des années 1980 et inspiré par l’institution néo-orléanaise qu’est le Dirty Dozen Brass Band, le Rebirth Brass Band rassemble différents excellents trompettistes, trombonistes, joueurs de tuba (19 musiciens y ont participé, dont Ruffins)  et mêle dans son répertoire des spirituals, des ragtimes, des musiques de marche et des compositions originales qui leur donnent une sensibilité contemporaine. Ils s’attachent à remettre au goût du jour des classiques ryhtm & blues tels I’m Walkin’ ou Big Chief, dépoussiérant sans complexe, comme beaucoup d’autres, un répertoire qui remonte pour le moins aux années 40. Ils s’inspirent aussi de la musique urbaine contemporaine, n’ignorant pas tous les bienfaits et la créativité des scènes hip-hop et rap. L’un de leurs morceaux, Shake Your Body, évoque le Shake ya Ass du chanteur hip-hop Mystikal. Le Rebirth Brass Band a fêté récemment son 25 ème anniversaire. Leur carrière les a amenés aux quatre coins du monde, ils ont joué avec les Meters ou Grateful Dead. Ils ont fait d’un groove particulier leur signature. « Nous essayons de le faire sonner comme si nous jouions dans la rue » explique le percussionniste Keith Frazer. En 2011, ils font enfin paraitre le disque qui interroge la reconstruction toujours en cours de la Nouvelle-Orléans, Rebirth of New Orleans ; et semblent recommencer comme si rien n’était arrivé auparavant.
La série laisse à Steve Earle le mot de la fin : « This city won’t wash away/this city won’t ever drown ». Son nouvel album a aussi une chanson qui s’appelle Gulf of Mexico. L’explosion de la plateforme BP avait tout pour replonger la Nouvelle Orléans dans la morosité ; ils ne lui ont pas cédé.

Treme : Music from the original HBO series

Parution : 2011
Genre : Rythm & Blues, Zydeco, Latin, Cajun, Brass Bands...
A écouter : We Made it Throught That Water, Feel Like Funkin' it Up, This City, Shame, Shame, Shame...

8/10
Qualités : entraînant, dansant, funky




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