“…you can hear whatever you want to hear in it, in a way that’s personal to you.”

James Vincent MCMORROW

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lundi 2 décembre 2013

Groupe de l'année 2013 : LOS CAMPESINOS (1)


L’urgence d’Arcade Fire, alors qu’ils semblent comme eux célébrer une amitié triomphante, est moins amère, moins du type Shakespeare transformé en feuilleton, avec sa reine folle et les héros de jeunesse rendus ivres de victoires et d’honneur par leurs sorcières de copines. Los Campesinos n’ont pas changé le monde du rock indépendant comme Arcade Fire avec leur album-concept évoquant la banlieue de leur enfance, The Suburbs (2010) – ils ont énergiquement commencé par envenimer leurs relations avec leurs amis d’université, ceux qui se sont reconnus, mais trop tard, dans leurs chansons.
Il y a sans doute eu ceux qu’elles ont persuadé qu’il ne fallait pas s’en faire, qu’elles n’étaient qu’un feu de paille, et ceux qu’elles ont transformé de manière positive, durablement. Gareth ‘Campesinos’ - le nom du groupe, les ‘paysans’ en espagnol, leur sert de patronyme à tous – est de ceux là, du côté de ceux qui voient les chansons suggestives comme une thérapie de longue durée – six ans déjà qu’il a commencé. Chanteur d’un groupe qui démarre en 2007 à 7 membres, il est l’animateur du jeu télévisé qu’aurait pu susciter Los Campesinos avec certaines de leur chansons. On imagine bien Gareth convier les filles dont il a coutume de trahir l’intimité, pour qu’elles puissent défendre leur version des faits face à leur auditeurs.
Basé sur ce que tu dis sur Tweeter, on dirait que tu regardes l’émission Britain’s Got Talent 20 heures par semaine.
Oui, c’est assez vrai. Nous sommes des gens très simples. En particulier en Angleterre, je pense que les gens cherchaient à nous mettre dans une niche, à cause des tee shirts que nous portions, à l’effigie de certains groupes et des choses enflammées que j’ai dites en interview, et on a rapidement fait de nous des snobs, qui s’enfermaient dans une certaine classe.
Los Campesinos sont pétris d’enthousiasme, le groupe le plus entraînant voire infantilisant au monde à leurs débuts. Dans cette foule, regardez maintenant Gareth. Il adore les émissions de divertissement, le football, les relations et internet. Ce n’est peut-être plus un étudiant, mais il travaille dur au véritable sport du groupe : l’antisnobisme. Faire allusion à d’autres artistes sans s’en emparer, ne juger personne en parlant de tout le monde, jouer devant les fans sans créer une hiérarchie entre eux et le public. Pour compenser l’énergie de Gareth à amener ses chansons, à raconter l’histoire de son entourage, il faudrait qu’un autre garçon de l’université de Cardiff conçoive dans son studette une contre-paysannerie carburant à l’humiliation et à la frustration que Los Campesinos ont provoquées quand Gareth dérape. Quelqu’un le déteste forcément, ou le détestait avant que son groupe ne sorte pour de bon du carcan des relations pour prendre une dimension plus globale avec No Blues en 2013. A la lumière de ce nouvel album, les précédents, Hold on Now, Youngster (2008) et Romance is Boring (2010), en particulier, prennent de la valeur, paraissent essentiels à une certaine école de vie où l’on apprend la subtilité.
Contrer Los Campesinos efficacement voudrait dire avoir la main aussi heureuse qu’eux quant au choix du producteur : Dave Newfeld a travaillé avec un autre groupe Canadien nombreux, Broken Social Scene, et il le fallait pour éviter que le mélange des voix, des instruments, de l’énergie et des mélodies ne fasse de Hold on Now, Youngster un désastre. Au lieu de quoi, la combinaison d’énergie punk, de la verve de Gareth, de l’émotion juvénile et du son abrasif du rock ‘garage’ a trouvé son équilibre ici, dès les débuts du groupe. Avec ses voix plus diverses et incontrôlées, son instrumentation plus sèche et entraînante et sa progression plus chaotique que ce que le groupe fera par la suite, Hold On Now, Youngster est le parfait album de jeunesse. Pour expliquer sa singularité, il faudrait raconter que deux des trois filles du groupe l’ont quitté depuis pour poursuivre leurs études, pendant les six ans qui séparent cet album de No Blues. Don’t Tell Me To Do The Maths contient la meilleure performance d’Aleksandra Campesinos, et un condensé de ce que le groupe a délaissé au fil des années. Aleks, mais aussi : la prédominance d’un instrument de percussion qui va nécessiter une petite explication de Gareth, et une fougue qui sera remplacée par un déroulement plus imposant des couplets et des refrains. L’ambiance générale, enfantine, sera conservée. Aleksandra quitte le groupe peu après l’enregistrement de Hold On Now, Youngster au profit de Kim, la sœur de Gareth.
Six ans, c’est environ l’âge des enfants devant lesquels le groupe a joué l’une de leurs premières et de leurs plus mémorables chansons, celle qui commence par un simple accord de guitare avant d’accélérer doucement, en une longue intro, et d’exploser sur la mélodie entêtante de son refrain. C’était à l’occasion d’une initiative étonnante, Kidrockers, des concerts filmés, organisés dans plusieurs grandes villes des Etats Unis, qui sont « conçus pour faire venir les familles au complet, et assister aux performances d’artistes parmi les plus engageants et vitaux de la musique indie. Les artistes jouent des chansons originales (et pas spécifiquement conçues pour des enfants) d’une façon qui est à la fois authentique et adaptée aux plus petits ». Los Campesinos devaient s’y produire. Il a paru naturel à Gareth de commencer la performance de You ! Me ! Dancing par expliquer la différence entre un xylophone et un glokenspiel (l’un en bois, l’autre en métal). L’instrument et des paroles un peu plus timides que ce que l’on connaîtra par la suite positionnent You ! Me ! Dancing loin des chansons plus récentes, amples et douloureuses de Gareth. Mais ce que le groupe n’a pas transformé, il a su toujours le ramener au frisson originel produit par cette chanson. Un moment de leur carrière où une petite fille dans la salle pouvait leur demander « et pourquoi vous n’aimez pas danser ? » puisqu’on avait demandé aux enfants de reprendre en coeur « One Thing that i could never confess/is that i could’nt dance a single step. »
The Hobbies
Ne pas savoir danser est le point commun de tous ceux qui passent trop de temps à regarder les autres vivre dans un écran, par exemple. Mais la remise en question de ses capacités, que ce soit à maintenir une relation, à danser, etc. est l’un des aspects évoqués habituellement dans les chansons et chez les groupes indie surtout. Si c’est pour passer une partie de sa vie à énumérer des relations ratées en portant les cartons de sa collection de disques, comme John Cusack dans l’adaptation du livre de Nick Hornby, Haute Fidélité, il vaut mieux s’en amuser.
Sur le premier album toujours, My Year in Lists est une chanson de 266 mots et d’un peu moins de deux minutes. Il y est question de résolutions prises pour le nouvel an, une liste qui va jusqu’à cinq comme lorsque Cusack classe avec obsession ses disques préférés. Et cette phrase sur Knee Deep at ATP : «Well, I need new hobbies, that’s one thing for certain », comme si ces nouvelles passions allaient le transformer. Gareth sait chanter : mais il le fait comme on n’imagine qu’il danserait, donnant la sensation que même les relations infructueuses font partie de ces nouveaux hobbies après lesquels il court. Le football et internet remplissent le reste de son existence.
On peut dire de Los Campesinos qu’ils sont un avatar de la culture en ligne, d’une façon très personnelle, comme s’il s’agissait d’entretenir un hobby.
G.C. : «Oui, bien sûr. Internet est fait de quiconque l’utilise au moment où il l’utilise. Vous avez le siège conducteur. Ca sonne comme un spot de publicité pour Microsoft, mais quand vous êtes sur Internet, internet c’est vous. Vous créez votre propre univers. J’aime penser que nous sommes une partie de l’univers de beaucoup d’autres personnes et qu’ils sentent qu’ils font partie du vôtre.
Heureusement que des outils comme Tweeter et Tumblr n’existaient pas quand j’étais un adolescent, car mon empreinte sur internet serait bien plus humiliante qu’elle ne l’est déjà. J’ai le réflexe de ne pas faire des réflexions complètement stupides à tout bout de champ, mais si j’avais 17 ans, rentrant de l’école à la maison chaque jour et ayant un compte Tweeter et un blog, ce serait terrible. J’ essaierais d’attirer l’attention compulsivement, d’embobiner des filles en échouant misérablement, et de tout faire pour paraître incompris et artiste. Tu sais – exactement comme je m’en sors dans mes chansons (rires).»
 
Avec toutes ces tares de jeunesse, Los Campesinos peuvent sembler du genre à déambuler sans autre but que le plaisir de se produire jusqu’à ce qu’une guerre des amis les fasse abandonner, confus, pour se trouver un vrai travail. A l’écoute de Hold on Now, Youngster pourtant, on admire en réalité leur engagement prometteur, leur volonté d’enregistrer méticuleusement chaque instrument, de contrôler les crescendos, les mouvements, les détours de phrases, les éclats de voix, retombant toujours en place dans un timing serré, recréant le son alternatif anglais différemment. Même si ce premier jet sera trop épuisant pour certains, par manque de ballades, de respirations, la satisfaction d’avoir une chanson aussi bonne que Sweet Dreams, Sweet Cheeks à la fin de l’album est un nouveau triomphe. «One blink for yes, two blinks for no!» C’est la déclaration d’un groupe plein d’assurance, pour qui l’université est en train de perdre son intérêt comme carrière alternative tant ils ont réussi de moments générateurs de vie en 12 chansons. Et une dernière fois, qui voudrait contrer Les Campesinos par vengeance personnelle contre Gareth devra enregistrer jusqu’à une heure de musique sans céder à la chanson reposante que certains pouvaient demander.
à suivre
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